Cellule de crises

Capture d’écran 2017-11-15 à 10.47.09.png

Ça commence généralement dès le réveil. Surtout ne pas se tromper, la petite dernière veut un jus de POMMES. Rappelle toi hier matin, comment elle a vrillé la gamine avec le jus d’orange. Elle n’aime plus le jus d’orange, depuis hier seulement je sais, mais il faut y penser. Pour la tartine de confiture, attention aussi. Pas trop grillée, sinon c’est le drame. Cris, crises, pleurs, colère, refus total d’avaler quoi que ce soit et trajet pour l’école apocalyptique. Ouf, c’est bon, on a passé l’épreuve de la tartine avec succès, jusqu’ici tout va bien. Et puis soudain, nouveau grain de sable dans la mécanique fragile du matin. Ses chaussures ne lui vont plus. Trop petites. On les a pourtant achetées lundi dernier. Avant-hier, elles étaient trop grandes ou trop rigides les chaussures, peut-être trop noires ou pas assez brillantes, je ne sais plus. Malgré toutes les précautions prises en amont, le trajet pour l’école sera encore une fois un calvaire pour tous. C’était la même chose hier, quand elle a voulu apporter sa poupée à l’école et que j’ai refusé. Ce sera la même chose demain, elle trouvera forcément, je le sais, elle n’est pas mon premier enfant …La journée au bureau est terminée, vite, il est l’heure d’aller les chercher. Que j’adore ce petit bonheur quotidien, cet instant parfait où ton môme te voit à la sortie de l’école et sourit de toutes ses dents de lait. Pourtant, depuis quelques temps, mon ventre se serre un peu, appréhendant le moment où la magie cessera brutalement, à cause d’un bonnet qui gratte sur le retour ou d’un détail que je n’ai pas anticipé, mais qui saura la contrarier. Et voilà, encore une fois, ça a dérapé, la crise et la colère ont gagné, on passera tous une mauvaise soirée.

Ces dernières semaines, je suis sur le fil. Cherchant l’équilibre, un peu à droite, un peu à gauche, je vacille, puis je tombe, très souvent. Malgré mes 10 ans d’expérience en parentalité approximative*,  je tombe encore, mais ça n’est pas bien grave finalement. L’important est de se relever rapidement.

Comment gérer les crises ? Comment traverser cette période particulière où chaque situation de la vie courante peut provoquer la guerre des nerfs ? Moi, j’avance péniblement sur mon fil. D’un côté je cède, de l’autre je punis. Parfois je discute, et parfois je crie. Je joue les équilibristes. Je sais qu’il faudrait de la cohérence. Je sais qu’il faudrait que je choisisse mon camp. Trop sévère, trop laxiste, trop permissive, trop rigide … je ne sais pas quelle direction prendre, changeant souvent en cours de route, rebroussant chemin parfois. Car si mon rôle est d’éduquer, il est aussi de maintenir un climat serein pour tous. Alors je m’arrange, je compose, je négocie, parce que quand la petite dernière craque sa culotte pour un énième caprice, les 3 autres subissent les cris, mon agacement, la pression qui monte et mon énervement.  Alors oui, parfois je cède. Je dis oui pour le morceau de pain ou pour un bonbon après le bain.  Parfois au contraire, je décide de ne rien lâcher et j’accepte le bras de fer. Mais la lutte est inégale, ma voix un peu trop forte et mes gestes un peu trop brusques …  la victoire a toujours un goût amer. Alors que faire ? Pas grand chose finalement, et attendre tout simplement. Comme les mauvaises nuits et les pipis au lit, les crises, je sais qu’un jour, ce sera fini. D’ici là, j’essaie de ne pas me laisser dépasser. Je suis très attentive parce que ces colères, c’est ce que j’ai le plus de mal à gérer.  Et je continue sur ma lancée, un peu à droite, un peu à gauche, je vacille et si je tombe, ça n’est pas bien grave finalement. L’important est de se relever rapidement.

* La parentalité approximative est la méthode généralement utilisée par les multipares. Elle repose sur le principe de l’approximation donc. Un jour on dit oui, l’autre jour on dit non, mais toujours avec de bonnes intentions. Cette méthode est aussi celle du « faire ce qu’on peut ».

116 commentaires sur “Cellule de crises

  1. Ça me fait du bien de lire ça moi qui suis en plein dedans avec mon aîné…et le matin c’est juste l’enfer !! En ce moment je dois avouer que je ne gère plus du tout (gros manque de sommeil « grâce » au second, déménagement tout récent…) alors lire que ça peut arriver à d’autres et bien … ça me réconforte 😉
    (Et je me demande surtout comment on fait quand on en a 3 autres à gérer ..! ;-))
    Merci pour ce petit sas qui fait du bien 🙂

    J’aime

  2. J’ai l’impression de revenir plus de 15 ans en arrière, avec ma cadette, qui nous a fait ça pendant… je ne sais plus… mais ça m’a paru long, et difficile, et épuisant. Je me rappelle encore d’un morceau de pain de mie pas plié dans le bon sens. Et de tout ce que tu racontes aussi.
    Je l’ai d’abord traduit par un besoin d’attention plus important encore, mais je ne sais pas si c’était vraiment ça. Je crois avoir compris plus tard que c’est de l’hypersensibilité, et que ça débordait comme ça, par crises incontrôlées et impossibles à endiguer.
    A l’adolescence, et c’est encore le cas (elle aura 18 ans en mars), elle nous a soufflé le chaud et le froid, on ne savait jamais de quelle humeur serait le jour, ou l’heure, ou la minute. C’est frustrant et fatigant, elle malmenait (sans intention de nuire) mon coeur jusqu’au jour où j’ai décidé de ne plus m’y attacher, et de sourire en réponse, toujours, et pas seulement en façade. Comme je m’étais blindée pour ses crises de larmes d’enfant petite, je me suis protégée de ses humeurs changeantes. En général ça adoucit les jours sans.
    Elle a une belle âme, sensible et profonde, mais très secrète aussi. Elle. a. une. belle. âme.
    Qui me touche profondément.

    J’aime

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s